La Compagnie des experts près la cour d’appel de Douai est une association de professionnels ne pouvant être assimilée à un Ordre et ne comportant, pour les experts inscrits sur une des listes prévues par la loi du 29 juin 1971 modifiée, aucune obligation d'adhésion. On ne peut donc parler de déontologie, mais de règles de conduite érigées en un code d'éthique professionnelle, ou d'une charte de devoirs et obligations.
En tout premier lieu, l'expert judiciaire, qu'il soit ou non membre de la Compagnie, se doit à tout le moins de connaître et de respecter les règles édictées par les codes (procédure civile, procédure administrative et procédure pénale).
Il prête serment lors de son inscription, dans les termes qui suivent :
"Je jure d'apporter mon concours à la justice,
d'accomplir ma mission, de faire mon rapport et
de donner mon avis en mon honneur et en ma conscience"
(article 6 de la loi du 29 juin 1971 et article 22 du décret du 23 décembre 2004)
L'expert n'est pas un témoin, et son serment diffère de celui de ce dernier qui, aux termes de l'article 331 du code de procédure pénale, jure de parler sans haine et sans crainte et dire toute la vérité et rien que la vérité.
L'expert judiciaire est, comme le juge, soumis aux mêmes dispositions du code de procédure civile en matière d'administration judiciaire de la preuve et notamment en matière de communication de pièces entre les parties. A ce titre, il doit respecter scrupuleusement le principe de la contradiction et veiller au respect entre les parties de ce principe fondamental, que les pièces lui soient communiquées par les parties ou qu'il les ait recueillies directement dans le cadre de ses investigations.
Outre ces prescriptions, l'expert judiciaire, membre de la Compagnie, s'oblige, du fait de son adhésion à la Compagnie, elle-même membre du Conseil national des compagnies d'experts de justice (CNCEJ), à respecter les règles d'éthique professionnelle élaborées par le CNCEJ, concernant :
L'ensemble de ces prescriptions est contenu dans les règles de déontologie établies par le CNCEJ :
Elles sont relatives aux devoirs de l’expert envers lui-même, les juges, les avocats, les parties et les autres experts. Le dernier chapitre, particulièrement important, est relatif aux consultations privées.
I -1) L’expert qui adhère à une Compagnie membre du Conseil national est une personne expérimentée dans un art, une science, une technique ou un métier, inscrite sur une des listes et/ou un des tableaux prévus par la loi ou les textes réglementaires, à qui le juge confie la mission de lui apporter les renseignements et avis techniques nécessaires à la solution d’un litige.
L’expert inscrit sur une liste officielle ou l’expert honoraire participe, pendant l’exécution des missions qui lui sont confiées, au service public de la justice.
Il concourt à l’œuvre de justice et doit se présenter devant les justiciables, les avocats et les juges avec une tenue et un comportement qui répondent aux exigences de dignité, aussi bien sur le lieu de l’expertise que lors des manifestations qui se tiennent dans une enceinte de justice.
I - 2) L’expert inscrit sur une liste officielle en raison de sa compétence, exerce une activité répondant aux missions qui lui sont confiées. L’expert commis s’engage à respecter les textes en vigueur, notamment ceux qui régissent l’activité expertale.
I - 3) L’expert doit se comporter avec loyauté, indépendance et impartialité en toutes circonstances. Il remplit sa mission en faisant abstraction de toute opinion, appréciation subjective ou idée préconçue.
I – 4) Si l’expert commis estime qu’il peut exister un doute sur son impartialité ou son indépendance, il s’en ouvre sans délai aux parties et si nécessaire au juge.
I – 5) L’expert doit entretenir et améliorer sa compétence en suivant une formation continue portant à la fois sur son métier, y compris dans ses aspects règlementaires, sur la technique expertale et sur la procédure.
I – 6) L’expert commis éclaire le juge quant à la nature et au coût probable des travaux à réaliser. Il ne doit en aucun cas concevoir aux lieu et place des parties des travaux ou traitements, les diriger ou en surveiller l’exécution ; il donne son avis dans les limites de sa mission sur les propositions faites par les parties en vue de remédier aux causes des désordres à l’origine du litige.
I – 7) Lorsque l’expert constate un danger ou un risque, il doit en avertir la ou les partie(s) concernée(s) dans le respect du principe de la contradiction et sous réserve, le cas échéant, du secret professionnel. Si nécessaire, il en rend compte au juge.
I – 8) L’expert qui a accepté une mission est tenu de la remplir jusqu’à complète exécution. Lorsqu’il est empêché pour un motif légitime de poursuivre sa mission, l’expert doit, dans les meilleurs délais, en informer le juge en précisant le motif de son empêchement.
I - 9) L’expert doit conserver une indépendance absolue, ne cédant à aucune pression ou influence, de quelque nature qu’elle soit. Sauf accord écrit des parties, il doit s’interdire d’accepter toute mission privée de conseil ou d’arbitre constituant un prolongement de la mission judiciaire qui lui a été confiée.
I - 10) A l’égard des sapiteurs, collaborateurs ou tous autres assistants, l’expert respecte et fait respecter l’ensemble des principes déontologiques de dignité, respect, courtoisie, qui sont les règles de base de son comportement personnel et professionnel.
I - 11) L’expert respecte et fait respecter en toute circonstance l’obligation de discrétion. Il doit agir avec tact et réserve dans le respect de la dignité humaine et du secret des affaires. A ce titre, il s’interdit de faire état de toute information de nature à porter atteinte à la réputation ou à la vie privée des personnes, physiques et morales.
I -12) Dans les limites de la mission et sauf obligation plus stricte découlant de la déontologie propre à sa profession, l’expert n’est lié à l’égard du juge qui l’a commis par aucun secret professionnel. Le secret expertal doit être respecté par les collaborateurs de l’expert, par les assistants fussent-ils occasionnels, et par toute personne qu’il est amené à consulter, à charge pour lui de les en informer préalablement.
I - 13) L’expert s’interdit toute publicité en relation avec sa qualité d’expert de justice. Il peut porter sur son papier à lettre et ses cartes de visite la mention de son inscription sur une liste ou un tableau dans les termes prévus par les textes en vigueur. Mais il doit éviter toute ambiguïté concernant la rubrique dans laquelle il a été inscrit (cf. la nomenclature des rubriques expertales). Il lui est donc vivement conseillé de l’indiquer sur tous les documents qui émanent de lui.
S’il appartient à une compagnie membre du Conseil national, il peut le mentionner.
I -14) L’expert doit s’abstenir de toute démarche ou proposition en vue d’obtenir des missions. Néanmoins l’expert nouvellement inscrit pourra se faire connaître des juridictions de son ressort.
I - 15) L’expert admis à l’honorariat doit le mentionner en toutes lettres sur les documents qui émanent de lui.
II.1 – L’expert observe une attitude déférente envers le juge, attentive à l’égard des parties et courtoise vis-à-vis des avocats.
II.2 – Lors de sa désignation l’expert doit s’assurer :
II.3 – L’expert inscrit sur une liste qui refuse d’exécuter la mission confiée par un juge doit motiver son refus et être à même d’en justifier pour des raisons objectives.
II.4 – L’expert doit se conformer aux termes de la mission qui lui est confiée et répondre précisément aux questions qui lui sont posées.
II.5 – En cas de doute sur l’étendue et/ou les limites de sa mission, l’expert ne doit pas hésiter à s’en ouvrir aux parties et à en référer au juge.
II.6 – Au cours de ses opérations l’expert fait preuve de l’autorité nécessaire pour que les diligences incombant aux parties soient exécutées sans retard et que les débats demeurent constructifs et sereins. Il conserve une attitude digne et évite tout comportement vis-à-vis des parties ou de leurs conseils susceptibles de faire douter de son impartialité. Il fait preuve d’une écoute attentive et compréhensive à l’égard des parties, qu’elles soient ou non assistées de conseils.
II.7 – L’expert doit avoir le souci de la compréhension par les parties de la progression de son raisonnement. Il facilite le débat contradictoire et n’hésite pas, si nécessaire, à modifier son avis au cours de ses opérations, les parties étant informées.
II.8 – Si l’expert est sollicité par le juge pour exposer son point de vue, il le fait en toute indépendance.
II.9 – Le juge n’étant pas lié par l’avis de l’expert, celui-ci doit s’attacher à ce que son rapport permette de comprendre sans difficulté son raisonnement.
III - 1) L’expert est tenu de s’exprimer avec modération à l’égard de ses confrères.
III -2) Si l’expert est appelé à succéder dans des opérations d’expertise à un confrère décédé, il doit veiller à sauvegarder les intérêts des ayants droit de celui-ci pour les opérations déjà engagées qu’il est amené à poursuivre.
III-3) L’expert appelé à porter une appréciation sur le travail d’un autre expert ou de tout professionnel ne doit se prononcer qu’en pleine connaissance de cause et avec impartialité.
Ses avis ou appréciations doivent être toujours clairement exprimés et motivés avec objectivité et sans agressivité.
III - 4) Dans le cas où un différend surviendrait entre deux ou plusieurs experts adhérents d’une même Compagnie membre du Conseil national, ceux-ci doivent le soumettre au président de la compagnie concernée qui s’efforcera de les concilier et dont ils suivront les conseils et avis.
Si le conflit survient entre adhérents de compagnies différentes membres du Conseil national, il sera soumis aux Présidents des compagnies concernées qui en référeront en tant que de besoin au Président du Conseil national.
III - 5 L’expert adhérent d’une compagnie membre du Conseil national s’engage à apporter, à la demande du président de la compagnie dont il dépend et dans les conditions définies par celui-ci, toute assistance à l’un de ses confrères momentanément empêché, ou aux ayants droits de celui-ci, sans chercher à en tirer un profit personnel, étant rappelé qu’il ne pourra se substituer au confrère défaillant que sur décision du juge commettant.
Préambule
Selon l'article 6-1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, toute personne physique et morale a droit à un procès équitable.
A cet égard le recours à un technicien compétent qualifié couramment « d’expert de partie » peut s’avérer utile. Dans ce contexte, il convient de préciser les conditions dans lesquelles un expert inscrit sur une liste ou sur un tableau peut assister techniquement une partie.
IV - 1) L’expert intervenant comme consultant technique, à titre privé, doit faire en sorte qu’aucune ambiguïté n’existe sur le fait que son avis (en principe écrit) ne constitue pas une expertise de justice. N’étant pas désigné par le juge et ne menant pas ses travaux de façon contradictoire, il doit présenter cependant les mêmes garanties d’objectivité et d’impartialité que l’expert de justice.
IV - 2) L’expert consulté sera tenu de donner son avis en toute liberté d’esprit et sans manquer à la probité ou à l’honneur.
Il rappellera explicitement les conditions de son intervention dans son avis.
IV – 3) Il doit, de façon générale, avoir la même relation avec la vérité que s’il était nommé par une juridiction. Il ne peut mentir, fût-ce par omission. Il ne peut « faire le tri » entre les pièces dont il a eu connaissance et dont il doit établir et communiquer un bordereau complet.
IV – 4) Il est recommandé, avant d’accepter une mission de consultant technique d’une partie, de faire signer une lettre de mission rappelant les principes qui précèdent et faisant explicitement référence aux présentes règles de déontologie.
IV – 5) La rémunération de l’expert ne devra en aucune façon comporter un honoraire de résultat et la lettre de mission devra rappeler à la partie consultante que les avis écrits de l’expert ne pourront être produits que dans leur intégralité.
IV – 6) Il est impératif que les consultations privées ne soient ni recherchées, ni sollicitées.
IV - 7) L’expert adhérent d’une Compagnie membre du Conseil national s’interdit d’accepter des missions de consultant technique d’une partie, dont le caractère récurrent pourrait être de nature à porter atteinte à son indépendance ou à en faire douter. En outre, il s’engage à respecter les dispositions éventuellement plus strictes de la Compagnie dont il est membre.
IV - 8) L’expert inscrit peut être appelé en consultation à titre privé dans les circonstances suivantes :
Il se fera préciser par écrit l’état procédural de l’affaire au moment de la consultation.
IV - 9) Dans le cas où l’expert est appelé à intervenir avant le début d’un procès ou avant la désignation d’un expert de justice, il lui est recommandé de bien préciser que son avis se rapportera à l’état des éléments et des pièces qu’il aura été amené à connaître à la date où il le donnera et d’inclure dans sa consultation un bordereau des pièces communiquées à cette occasion.
En aucun cas, il ne peut ensuite accepter une mission d’expertise de caractère juridictionnel concernant la même affaire.
IV - 10) S’il intervient alors qu’un expert a été chargé d’une mission par un juge qui n’est pas encore achevée, la consultation sera diligentée dans un esprit de loyauté à l’égard de cet expert commis, qu’il informera préalablement à son intervention.
S’il participe à une réunion d’expertise, il veillera à ne porter en aucune façon atteinte à l’autorité de l’expert désigné et à la direction des opérations par ce dernier.
Il ne pourra assister aux opérations de l’expert en l’absence de la partie qui l’a consulté ou de son avocat, sauf mandat écrit.
IV - 11) Si l’expert commis a déjà déposé son rapport, et si la partie faisant appel à lui demande une note ou des observations écrites sur les travaux de son confrère, le consultant technique devra le faire dans une forme courtoise, à l’exclusion de toute critique blessante et inutile. Son avis ne pourra comporter que des appréciations techniques et scientifiques.
Il se fera confirmer par écrit, par celui qui le consulte, que les documents dont il dispose auront été produits au préalable à l’expertise de justice. Si cependant il doit utiliser des documents nouveaux, il en fera état et les joindra à son avis écrit.
En cas d’erreur matérielle relevée dans le rapport de l’expert de justice, ou de divergence d’appréciation, il se limitera à les exposer et à expliciter les conséquences en résultant.
V - 1) Tout manquement aux règles de déontologie sera sanctionné par les compagnies membres du Conseil national suivant leurs dispositions statutaires et dans le respect du principe de la contradiction vis-à-vis de l’expert mis en cause.
V - 2) Dans le cas où seraient portés à sa connaissance des comportements individuels ne respectant pas les règles de déontologie, le Conseil national informera la compagnie concernée.
Les deux instances se concerteront sur les suites éventuelles à donner.